Titre original : El origen del mundo
Traduction d’Émile et Nicole Martel
(Les Allusifs, 2001)
Le Chilien Jorge Edwards, né en 1931, est un des auteurs du boom de la littérature latino-américain qui marqua les années 1960-1970. Écrivain, critique littéraire, journaliste, il fut aussi diplomate. Il a reçu en 1999, le prix Cervantès.
En 1971, sous le gouvernement de Savaldor Allende, il travailla à l'ambassade de Cuba mais dut rapidement renoncer à son poste pour ses critiques envers le régime. Il a raconté cet épisode dans un livre intitulé Persona non grata (1973) qui provoqua une grande polémique parmi les intellectuels latino-américains. Suite au coup d'Etat de Pinochet, Jorge Edwards s'exila à Barcelone.
L'origine du monde, paru en 1996, n'est pas son livre le plus représentatif mais on y trouve l'écho de ces années de luttes, de polémiques et d'exil. Le fil conducteur du récit est simple : Un vieil homme, alors qu'un ami à lui se suicide, réalise que celui-ci a été l'amant de sa femme... Mais c'est un livre qui aborde de multiples thèmes : le dogmatisme politique, la vieillesse, l'amitié, Proust, Don Juan, Courbet et, surtout, la jalousie et les méandres du désir.
"-Tu sais quoi? demandai-je à Silvia à voix basse, après avoir regardé le tableau pendant une minute ou deux dans la grande salle des Courbet.
-Quoi? -Elle te ressemble beaucoup.
-Tu es fou! s'exclama Silvia, rougissante comme une collégienne, plus fâchée que je ne l'aurais prévu, et elle jeta un coup d'œil de part et d'autre, car il ne manquait jamais de touristes espagnols, surtout à cette époque de l'année, en plein été.
-Mais si, c'est le même petit bedon, lui expliquai-je, surpris, tout en riant, malgré tout, et en pensant que les Espagnols ne comprendraient pas l'expression chilienne, et les mêmes cuisses rondelettes, bien formées, jusqu'aux mêmes poils, la même...
- Vieux cochons! s'écria Silvia, toujours aussi agacée. Tais-toi!"
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| Le désespéré de Gustave Courbet |
