Titre original : Ursúa
Traduction de Claude Bleton
(Jean-Claude Latès, 2007)
Le Colombien William Ospina, essayiste, journaliste, traducteur, poète, romancier est une des grandes figures intellectuelles actuelles de l'Amérique Latine. Il est notamment l'auteur d'une trilogie romanesque, fruit de longues années de recherche, qui revient sur la période de la Conquête : Ursúa, Le pays de la cannelle et La serpiente sin ojos (pas encore traduit en français).
Le premier volet de cette trilogie, publié en 2005, raconte la geste héroïque et violente du basque Pedro de Ursúa (1526-1561) nommé lieutenant gouverneur du Nouveau Royaume de Grenade en 1545. Un roman érudit qui nous plonge dans les enjeux politiques de la Conquête, un roman fastueux qui restitue l'émerveillement et la démesure suscités par le Nouveau Monde. Un livre indispensable sur une époque où l'avidité se nourrissait de légendes et où se mettaient en place de nouveaux modèles culturels, économiques et politiques qui allaient marquer l'époque moderne.
"Selon eux, l'or est pétri de la même substance que le soleil, qu'ils appellent la chair du dieu sur la terre, le visage que l'on peut regarder. C'est pourquoi tout objet solaire est pour eux prière et protection. Un casque de soleil sur le front, un grand bracelet, un lumineux collier de chauve-souris, un arc de soleil sortant d'une narine et entrant par l'autre, un éblouissement martelé sur la poitrine, c'est chaque fois le dieu lui-même entrant dans la bataille et ne laissant aucune place à la peur.
Tous les peuples de ces royaumes confièrent leur mémoire à des objets en or. Heredia trouva dans le pays des Zenú les bras des grands fromagers pleins de cloches en or de toutes tailles, des peuples qui portaient aux oreilles de grands arcs en filigrane ; Palomino vit dans la Sierra Nevada beaucoup d'hommes qui portaient avec fierté de féroces anneaux dans le nez en forme de singes, des colliers faits de rangées d'oiseaux ; Robledo récupéra chez les Quimbayas des centaines de récipients en métal, affronta des armées où chaque soldat était coiffé d'un casque en or si vif qu'il semblait de feu, ce qui le fit s'exclamer qu'il voyait une armée exclusivement composée de rois."
![]() |
| Maison seigneuriale de Pedro de Ursua à Arizkun, Navarre. |
