"Le principe de Van Helsing" de Juan Carlos Mondragón

 

Titre original : Mariposas bajo anestesia

Traduction de Gabriel Iaculli

(Editions du Seuil, 2004)


L'Uruguayen Juan Carlos Mondragón, né en 1951, est écrivain, critique littéraire et enseignant universitaire. Il a vécu et enseigné en France et il a reçu, en 2015, la médaille du Sénat pour son apport aux relations intellectuelles entre la France et l'Uruguay. Ce recueil de nouvelles permet de découvrir son univers narratif. On y trouve une variation sur la solitude urbaine (Merci de votre appel), un hommage au cinéma (Le principe de Van Helsing), une évocation de la violence à la frontière nord du Mexique à travers la figure du minotaure (Minotauromachie au clair de lune), un clin d’œil aux histoires d'horreur (Le surnom secret de la demoiselle londonienne), des jeux sur la littérature (Hortensia de serre, Dernières heures à Weimar)... D'une imagination déroutante et fine, l'écrivain s'attache à métamorphoser par la poésie le réel.

Ainsi, en écrivant, je tâche laborieusement de démultiplier mon regard, comme si je voulais être une mouche afin de découvrir le tournesol inouï tout en croyant contempler la quintessence du réel. La structure cristalline du langage, transparence d'étoiles de givre unies les unes aux autres par leurs sommets, empêche tout contact et crée l'illusion fugitive d'avoir formulé une phrase lisible.

Dans la minute qui suit, j'éprouve le besoin de me lever et d'aller me rafraîchir le visage au lavabo de la salle de bains, ou d'aller faire un tour pour me tirer du piège, mais l'écriture m'envoie valser tête la première contre la vitre incassable. Semblable à la mouche qui ne peut reculer ni chercher une autre voie de salut, j'ignore ces possibilités de détente et persiste dans l'ignorance, cette insistance idiote à me heurter continuellement contre la surface insensible de mes pages.