« La Secrète » de Héctor Abad

 

Titre original : La Oculta

Traduction d'Albert Bensoussan

(Éditions Gallimard, 2016)


Héctor Abad, né en 1958, est considéré comme une des voix les plus importantes de la littérature colombienne contemporaine. Dans ce roman, une fratrie prend la parole pour raconter une ferme cachée au cœur des Andes appelé La Secrète : Antonio qui a quitté la Colombie pour vivre son homosexualité à New York, Pilar, la gardienne de l'héritage, Eva, la plus jeune et la plus indépendante.

L'histoire de ce lieu se confond avec celle de la Colombie depuis sa fondation jusqu'aux temps cruels des narcotrafiquants, des guérilleros et des paramilitaires.


« Tout ce qui s'est passé, tout ce qui se passe encore dans cette ferme. D'abord les noyés du lac, cinq, à ma connaissance, de là mon respect particulier pour ces eaux sombres et mystérieuses. Et l'enlèvement de Lucas, qui fut pour moi pire que tout : non seulement on m'a volé mon fils pendant presque un an, mais en plus papa n'a pu le supporter, et cela l'a emporté. Puis l'arrivée des sauveurs (salut pire que la condamnation, remède pire que le mal) : il n'avait jamais coulé autant de sang. La fois où les paramilitaires sont venus tuer Eva. […] Et ces histoires que Toño raconte sur nos ancêtres en remontant les siècles. Mais moi, ces vieilleries me laissent froide, l'arbre généalogique, la fondation du village, ceux qui ont été tués ou sont morts il y a cent ans en défendant la ferme, tout ça ne me touche pas. C'est la mort de ceux que j'ai connus, ou les moments difficiles que nous avons passés ici qui me font mal, et non le passé. »