"Transparente" d'Enrique Medina

 

Paysan avec vache-Nicolay Andreyev, 1924

Titre original : Transparente

Traduit par Maria Poumier

(L'Harmattan, 2000)


Enrique Medina ( Buenos Aires, 1937) est un écrivain à qui on doit une vingtaine de romans et recueils de nouvelles. Son premier roman, Les tombes (Las tumbas), publié en 1972 et inspiré de sa propre expérience d'enfant en maison de correction a marqué les lettres argentines.

Transparente, paru en 1974, nous plonge, avec une construction calquée sur les caprices de la mémoire, dans le dur destin d'une femme issue d'un milieu rural, partie à la ville pour travailler. Ce roman poignant, et d'autant plus poignant qu'il est écrit dans une langue simple comme son héroïne, restitue tout un univers fait de labeur, de pauvreté ou de servitude, de rares moments heureux. Son aspect documentaire est renforcé par des photographies d'époque.


"Mon père était journalier. Il s'est enfermé dans la forêt avec toute la famille. Il y a laissé sa jeunesse, sa misère et sa tristesse, parce qu'il travaillait pour plusieurs familles du village. Les petits malins se sont enrichis sur son dos et celui comme lui. Un jour il en a eu assez, il s'est mis à son compte, il a même embauché, mais ça n'a pas duré....

Ma mère travaillait du matin au soir comme mon père. Débiter le bois à la hache, remplir les sacs de charbon ; puis, elle rentrait à la maison et continuait : pétrir le pain pour quinze personnes, en comptant les autres ouvriers ; ratisser, semer, clôturer et s'occuper des enfants. Parfois il était déjà minuit et elle cousait encore à la machine à la lumière du quinquet."