Titre
original : Mongólia
Traduction
de Geneviève Leibrich
(Éditions
Métailié, 2004)
Le
Brésilien Bernardo Carvalho propose dans ce livre, comme dans son
roman Neuf
nuits, une nouvelle variation sur la difficulté à
rendre compte de la réalité. Ici, pour ce faire, il choisit de
démultiplier les narrateurs : un photographe disparu lors d'un
voyage en Mongolie qui prend des notes; un diplomate, nommé
l'Occidental, qui part à la recherche du photographe en s'inspirant
des journaux laissés par le disparu; et, enfin, un dernier lecteur
qui revient sur l'ensemble de ces deux itinéraires à partir des
carnets du diplomate. Ce roman est un fabuleux récit de voyage à
trois voix dont le cœur est le mystère et l’étrangeté.
"De retour à l'hôtel au milieu de l'après-midi, l'Occidental a commencé à lire le deuxième journal donné par Purevbaatar. En haut de la première page, inscrit en lettres d'imprimerie, figurait un nom : Narkhajid. C'était comme un titre qui avait été rajouté dans l'espace exigu au-dessus de la première ligne et qui donnait rétrospectivement un sens à tout le reste. Le journal commençait quelques jours avant le prétendu embarquement raté du jeune homme pour Pékin. Burru Nomton. Il était revenu à Ulaanbaatar après son voyage avec Ganbold qui l'avait mené de Khövsgöl au désert de Gobi. En principe c'était ses derniers jours en Mongolie et rien n'indiquait qu'il ait l'intention de rester ni de prolonger son séjour. Curieusement, il n'avait pas encore été pris de l'impulsion inexplicable d'entreprendre une nouvelle expédition, cette fois dans l'ouest du pays. Il était prêt à partir. Il s'était acquitté de sa mission pour la revue de voyage, jusqu'au moment où Ganbold lui a proposé inopinément de visiter un temple de religieuses bouddhistes. Alors, d'un instant à l'autre, il a changé d'idée et il a déclaré qu'il lui fallait absolument aller dans les monts Altaï avant de quitter la Mongolie."
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| Narkhajid (appelé Vajara Yogini au Tibet et en Chine) |
